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Lovers at first sight

Comme beaucoup de gens en France, c’est avec le film de Milos Forman Man on the moon (1999) que j’ai fait la connaissance d’Andy Kaufman, l’inclassable génie américain. Aux États-Unis, ce roi du canular mais pas que, qui aura su se faire aimer autant que détester, est également connu au travers d’un de ses personnages, le plus célèbre et le plus abject : Tony Clifton. Au-delà de la performance exceptionnelle de Jim Carrey (à voir : le documentaire Jim & Andy), j’ai tout de suite été fasciné par Kaufman et son dévouement total à des blagues qui souvent ne faisaient rire que lui et Bob Zmuda, son complice de toujours.

Un beau jour de mai 2019, je reçois un mail de Joshua Hull, que je ne connais pas. Il m’explique qu’il adore mon travail (notamment les posters que j’avais créés autour de The Shining et Le Labyrinthe de Pan pour une expo chez Hero Complex Gallery en 2014). Un mordu de cinéma, apparemment, on risque de bien s’entendre.

Il travaille sur un projet de bouquin avec Posterspy (avec qui on avait déjà fait un collectif chez ARTtitude) qui parle de 50 films qui n’ont jamais pu se faire, et il voudrait que je sois l’un des 50 artistes qui illustrent tout ça. La proposition est beaucoup trop tentante pour que j’envisage d’hésiter.

Josh m’envoie 5 concepts de films qui pourraient aller avec mon style, et à moi de choisir celui pour lequel je ferai une fausse affiche de film. Parmi des pitchs alléchants, je m’arrête sur celui intitulé The Tony Clifton story. Aucune hésitation possible.

Josh, qui a forcément déjà fait toutes les recherches nécessaires, m’envoie le script du film, dans lequel je me plonge immédiatement. Étant moi-même fan à la fois de Kaufman et Clifton, je n’avais jamais osé imaginer un film les réunissant… C’est à la fois génial et absurde, vulgaire et touchant, et ça bousille le 4ème mur un paquet de fois. C’est incroyable. J’ai chialé de rire en le lisant, et puis j’ai chialé tout court en réalisant que je ne verrai jamais ce chef-d’œuvre sur grand écran.

Pas évident de résumer en une image ce film foutraque, et pourtant j’ai trouvé assez vite une idée qui me semblait raconter simplement la trame principale : Tony Clifton, convaincu d’être un chanteur talentueux (spoiler : non), rêve d’être une star. Andy Kaufman, star montante d’Hollywood, le repère dans un bar, le trouve nul, le produit et lui promet monts et merveilles dans l’idée de s’en mettre plein les poches, tout en ridiculisant Tony à son insu. Andy fait de Tony Clifton sa marionnette. Il le fabrique, l’incarne, le détruit, le réincarne,… Littéralement. Le tout sur fond d’amour de jeunesse perdu, de Bossu de Notre-Dame et d’adorateurs de Frank Sinatra cannibales. Ça vend du rêve, non ?

On est 2 ans plus tard, et le livre Underexposed! The 50 greatest movies never made, qui devait à l’origine sortir à l’automne 2020 (mais vous savez, Covid, tout ça), est enfin disponible chez Abrams Books (c’est à dire un peu partout dans le monde) ! Josh a fait un boulot de recherches incroyable, et en plus il écrit vachement bien. Même si c’est en anglais, je conseille fortement à ceux qui aiment le cinéma de se jeter sur cette lecture passionnante. Sans oublier les affiches (fictives, du coup) réalisées par des artistes du monde entier qui permettent de mieux se projeter à grands coups de “Et si…”.

Congrats Josh, and thank you veddy much !